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Arcade Hoang

De tous les Chinois qui voyagent en France au XVIIIe siècle, Arcade Hoang, est celui que l’on connaît le mieux grâce à l’émouvante biographie que lui a consacré l’historienne Danielle Elisseeff en 1985 : Moi, Arcade : interprète chinois du Roi-Soleil[1]. C’est également le premier Chinois, et en réalité le seul à cette époque, qui s’installe durablement en France, pays dans lequel il s’intègre au point d’épouser une femme française dont il aura une fille. Il est ramené en France en 1702 par Artus de Lyonne, vicaire apostolique au Sichuan. Accueilli dans un premier temps au séminaire des missions étrangères, il aura lui aussi droit à sa visite papale mais, à la différence de son prédécesseur, Michel Chin-fo-Tsoung, il prendra rapidement ses distances vis-à-vis des études théologiques et de la carrière cléricale à laquelle il renonce. En 1713, il devient l’interprète et le bibliothécaire orientaliste de Louis XIV. Il est notamment chargé de répertorier et de cataloguer les ouvrages de la Bibliothèque royale (ancêtre de la Bibliothèque nationale) ramenés d’Asie par les missionnaires.

Arcade Hoang exerce une influence importante sur les cercles savants français en contribuant grandement à faire avancer la connaissance de la langue chinoise classique. A travers son étroite collaboration avec Nicolas Fréret et Etienne Fourmont, membres de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, il rédige notamment la première grammaire du chinois et le premier lexique chinois-français, travail pionnier interrompu par sa mort prématurée en 1716, à l’âge de 37 ans. Danielle Elisseeff voit en lui, malgré la polémique dont elle fait état[2], « l’un des premiers ferments de la sinologie en Europe » (Ibid. : 33) « à l’origine d’une nouvelle réflexion européenne non seulement sur les structures du chinois, mais sur celle des langues en général. » (Ibid. : 41) L’influence d’Arcade Hoang ne s’arrête pas là. Devenu « une sorte d’« ambassadeur » de la Chine à Paris » (Ibid. : 35), il reçoit le tout Paris, dont Montesquieu, alors étudiant en philosophie au collège d’Harcourt qui se passionne pour la Chine. Arcade Hoang devient son informateur au cours de la série de rencontres qu’ils ont en 1713, le jeune homme le soumettant à un véritable questionnaire ethnographique où il est notamment question de religion, de philosophie, de politique, de langue et de culture. Ces entretiens donneront lieu à un document d’une vingtaine de feuillets, publié dans les Geographica II, intitulé « Quelques remarques sur la Chine que j’ay tirées des conversations que j’ay eues avec Mr Ouanges »[3]. On estime par ailleurs que l’orientalisme inversé, ce renversement de perspective auquel nous invite Montesquieu dans ses Lettres persanes doit beaucoup à ces échanges.

A notre connaissance, il n’existe malheureusement aucun portrait d’Arcade qui nous soit parvenu.

[1] L’auteur s’appuie notamment sur le journal tenu par Arcade entre 1713 et 1714, document actuellement conservé à la BNF.

[2] Après la mort d’Arcade Hoang, Fourmont se montre très critique à son égard, dénigrant le travail de celui-ci et s’attribuant tous les mérites des découvertes de son ancien professeur.

[3] Un doute existe néanmoins sur la source de ces notes, certains spécialistes les attribuant à Nicolas Fréret plutôt qu’à Montesquieu.

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